Le train de Méthot’s Mill

En 1854, une nouveauté hors du commun fit son apparition dans le comté de Lotbinière : des rails de fer ! Puis, sur ces voies ferrées passèrent d’est en ouest des voitures roulantes, visibles au loin avec leur traînée de vapeur noire et un sifflet marquant leur passage. Un nouveau mode de transport voyait le jour : le train. La construction du chemin de fer Grand Trunk Railway permit de relier Lévis à Richmond, puis à Montréal et, en bout de parcours, à Sarnia, en Ontario. Traversant Lotbinière, la voie ferrée, communément appelée le Grand Tronc par les francophones, permit l’expansion de deux nouveaux noyaux villageois : Rivière-Noire, devenu Saint-Agapit, et Méthot’s Mill, maintenant connu sous le nom de Dosquet.

Tout avait commencé dans les années 1830-1840 alors qu’une centaine d’hommes travaillaient pour Louis Méthot. Ces derniers déboisaient et transportaient le bois au moulin à scie construit le long de la rivière Henri. Méthot, ce bâtisseur originaire de Sainte-Croix-de-Lotbinière, eut tellement d’influence que le village formé autour de son moulin fut nommé Méthot’s Mill en son honneur, de même que la gare qui commença à prendre des passagers dès 1854.

En 1881, c’est au tour de Louis-Octave Ratté, marchand de Saint-Flavien, de s’y établir, avec sa famille, en se portant acquéreur des biens de Wenceslas Méthot, l’héritier de Louis. Il fit construire sa maison dans le village, le long de la voie ferrée. Une partie de sa résidence faisait office de magasin général, puis un hôtel permettant de loger les travailleurs du chemin de fer fut également érigé. Homme d’affaires influent associé aux grands noms des villes, monsieur Ratté prenait le train chaque lundi matin en direction de Québec, valise brune sous le bras, afin d’effectuer le dépôt de la semaine à la Caisse d’économie du Québec.

À son décès, en 1907, son épouse, Célina Roy, entreprit de concrétiser le rêve de son mari : que Méthot’s Mill devienne une paroisse distincte et autonome. C’est ainsi qu’en 1912, l’archevêque de Québec autorisa la fondation de la paroisse de Saint-Octave-de-Dosquet, maintenant mieux connue sous le seul vocable de Dosquet.

Les voyageurs en partance de Dosquet ont bien connu le gendre de l’illustre couple Ratté, monsieur François-Xavier Caron, chef de gare de 1885 à 1937. En 52 ans de service, monsieur Caron en a entendues des histoires ! Les gens de tout le comté affluaient à Dosquet pour prendre le train de Méthot’s Mill vers Québec. Certains devaient se rendre à la gare à pied, faute de monture. Les habitants de Sainte-Croix allaient en ville pour déposer de l’argent à la banque, car ce n’est qu’en 1910 que la municipalité eut la sienne. Même chose pour les habitants de Dosquet, dont la Banque canadienne nationale ouvrit ses portes vers 1925.

La gare de Méthot’s Mill était alors le lieu de rencontre des jeunes hommes et des jeunes filles, et où les raconteurs s’en donnaient à cœur de joie. Les histoires étaient également alimentées par le passage régulier du postillon Éphrem Roy qui transportait les sacs de courrier parvenus par le train jusqu’aux bureaux de poste en utilisant divers moyens de transport. Il se rendait notamment jusqu’à Sainte-Agathe-de-Lotbinière pour livrer la poste, non pas à cheval, en voiture ni à pied, mais bien en attelage de chiens ! Par la suite, ce sera en snowmobile que monsieur Joseph Faucher assurera le service de la poste et de taxi pour cette même paroisse.

À cette époque, une nouvelle coutume vit le jour : les voyages de noces ! Cette nouvelle pratique permettait aux époux de prolonger les festivités du mariage, de visiter de la famille ou de se retrouver pour un premier voyage en couple. Les nouveaux mariés de la région pouvaient maintenant partir en voyage vers Québec, Montréal ou même Niagara Falls, en Ontario, pour les plus aventureux.

Au fil du temps toutefois, la popularité du train s’amoindrit, et ce, dès la venue des automobiles au milieu du 20e siècle. À un point tel qu’en 1990, les rails de la voie ferrée désaffectée furent enlevés. En 1998, on aménagea une piste cyclable nommée le Parc régional linéaire de la MRC de Lotbinière, qui permit aux résidents et aux touristes de pratiquer de façon sécuritaire une activité récréative de plus en plus populaire. D’est en ouest, on aura vu défiler bien des générations de voyageurs empruntant des moyens de locomotion évoluant au fil du temps et des modes.

Source : Archives de folklore de l’Université Laval,
collection Rita Désy-Proulx et Saint-Octave-de-Dosquet 1912-1987.

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